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6ème congrès du GREPFA France, Annecy (15-16 mai 2003) 1
I. Leblic. D’une famille à l’autre : circulation enfantine kanak en Nouvelle-Calédonie
Isabelle LEBLIC
Ethnologue, LACITO-CNRS, Paris
D'une famille a l'autre :
Circulation enfantine kanak en Nouvelle-Calédonie
1. Différentes conceptions de la parenté
Avant toutes choses, il est nécessaire de rappeler quelques notions de base en matière de
parenté, couramment utilisées en anthropologie. Les éléments nécessaires de toute structure de
parenté1 sont la consanguinité, la filiation et l’alliance, avec une universalité de la prohibition de
l’inceste. Si les prohibitions de l'inceste touchent partout des parents différents, l’interdit sur
l'inceste existe dans toutes les sociétés.
L'étude de la parenté exige l'analyse de cinq champs d'intérêt : la terminologie, le mariage, la
résidence, la filiation et l'héritage. Je ne parlerai ici rapidement que de la terminologie, du
mariage et de la filiation.
A- La terminologie
Les critères principaux qui servent à distinguer entre eux les termes d'un paradigme de parenté
sont l'âge, le sexe, la génération, la collatéralité et l'alliance. Un terme de parenté est
descriptif lorsqu'il ne peut être appliqué qu'à un seul parent, à l'exclusion de tout autre, et
classificatoire lorsqu'il peut désigner des individus se situant en des lieux différents d'un
paradigme.
B- Deux types de règles de mariage
Les règles de mariage correspondent à un type négatif, quand on interdit la recherche d'un
conjoint possible parmi certaines catégories de parents ; à l’inverse, le type est positif, quand
on ajoute aux prohibitions la désignation d'une certaine catégorie de parents comme conjoint
désirable (préférentiel), voire nécessaire (prescriptif).
1
cf. Cl. Lévi-Strauss : l’atome élémentaire de parenté. C'est la structure de parenté qui existe la plus simple qu'on puisse
concevoir, qui consiste en quatre éléments : frère, sœur, père, fils, unis entre eux par deux couples d'oppositions
correlatives.
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C- La filiation
Il existe différents systèmes de filiation. Celle-ci peut être unilinéaire, soit patrilinéaire
(appartenance au groupe de père en fils), soit matrilinéaire (appartenance au groupe de mère en
fille) ;ou bien elle peut être bilinéaire (appartenance aussi bien à un groupe patrilinéaire qu'à un
groupe matrilinéaire) ou encore indifférenciée ou cognatique (appartenance à une quelconque
des quatre lignées issues de PP, MP, MM, PM2).
Dans ce cadre général, on peut trouver différentes types de familles, qui peuvent être : la
famille élémentaire qui regroupe les parents et leurs enfants ; la famille étendue qui voit la
coexistence sous un même toit et une même tutelle de multiples cellules conjugales apparentées,
avec plusieurs générations et/ou divers collatéraux ; le lignage qui est un groupe d'individus
descendant d'un ancêtre commun selon une filiation unilinéaire ; ou encore le clan qui est un
groupe plus vaste formé de plusieurs lignages, se réclamant d'un ancêtre éponyme sans pouvoir
retracer les liens généalogiques.
Je vais vous présenter maintenant rapidement les grandes caractériques de la parenté kanak
paicî3.
2. Conception kanak de la parenté
A- Une parenté patrilinéaire
Les lignages paicî sont patrilinéaires et exogames, c’est-à-dire qu’on appartient au lignage de son
père4, à vie pour un fils, jusqu'à son mariage pour une fille qui deviendra alors membre du
lignage de son mari. Cela signifie, entre autres, qu’il y a transmission du nom de lignage, des
totems, des droits et des terres de père en fils. Cela signifie également qu'un homme5 devient
ancêtre dans son lignage alors qu'une femme mariée sera ancêtre dans le lignage de son mari.
B- Une alliance préférentielle
Ches les Kanaks paicî, on se marie avec quelqu'un qui appartient à un autre lignage et qui est
idéalement en position de cousin croisé, dans le cadre d’un dualisme matrimonial qui répartit les
lignages en deux moitiés exogames, les Dui et les Bai. Cela signifie qu’un homme dui épouse une
femme bai et qu’un homme bai épouse une femme dui, les Dui et les Bai étant donc idéalement en
position de cousins croisés.
L'univers de la parenté paicî répartit donc les individus en deux groupes nommés les "gens de
mon côté" et les "gens de mon oncle maternel", que l'on peut appeler aussi les "maîtres de la
demeure" et les "utérins, invités". Dans toute rencontre, les Kanaks se répartissent entre ses
deux groupes.
2
Avec P = père et M = mère ; soit par exemple MP = mère de père. Par la suite nous aurons également Fr = frère, Sr =
sœur, C = cousins dont CX = cousins croisés et C// = cousins parallèles (cf. schéma 1 pour la distinction CX / C//).
3
J’ai travaillé dans la région de Ponérihouen, côte est de la Grande Terre de Nouvelle-Calédonie qui apaprtient à l’aire
linguistique paicî. Il faut se garder de généraliser cesd onnées à l’ensemble de la Nouvelle-Calédonie kanak, qui comprend
vingt-huit langues et une grande diversité de systèmes de parenté dans une trame d’organisation sociale commune à
l’ensemble de ces sociétés kanak.
4
Sauf si adoption dans un autre lignage.
5
Sauf si adoption dans un autre lignage.
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C- Les chemins de l'alliance
À ces considérations générales s'ajoutent des considérations particulières liées, entre autre
chose, à l'histoire des lignages, et qui induisent des interdits supplémentaires pour l'alliance,
comme les lignages dits frères (création de liens de parenté entre lignages par le fait d'avoir
cheminé ensemble, d'avoir partagé le même habitat, la même marmite sacrée et les mêmes
rituels, d'avoir mélangé leur sang ).
D- Une parenté classificatoire
La terminologie de parenté paicî est dite Iroquois6 et possède des grandes caractéristiques
suivantes :
- Les pères = père + frères de père
- Les mères = mère + sœurs de mère
- Les oncles maternels = frères de mère
- Les tantes paternelles = sœurs de père
- Une distinction entre cousins croisés (CX) = cousins et cousins parallèles (C//) = frères
et sœurs
Elle se distingue de la terminologie de parenté dite Eskimo7 (qui est la nôtre) par le fait que :
Terminologie eskimo Terminologie iroquoise
C// = CX C// ≠ CX
C ≠ Frères et sœurs C// = frères et sœurs
P ≠ [FrP = FrM] [P = FrP] ≠ FrM
M ≠ [SrM = SrP] [M = SrM] ≠ SrP
Schéma 1 : Distinction entre cousins croisés et cousins parallèles :
Ego
C// C//
CX CX
Fr Sr
P M
FrP
SrP SrM FrM
6
Dans la typologie des systèmes de parenté établie par Murdock en 1949 à la suite de Morgan qui avait réalisé une
importante monographie sur les Iroquois et une première étude des systèmes de parenté en 1870 , on distingue donc le
système dit Iroquois.
7
Le système de parenté dit Eskimo a été aussi établi dans la typologie de Murdock.
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3. Le chronotope kanak ou la notion de "temps-espace" dans la parenté kanak
A-Les généalogies, itinéraires et successions des générations
Les généalogies kanak représentent autant le temps que l'espace puisqu'elles sont à la fois un
itinéraire (succession d'anciens habitats) et une succession d'ancêtres et de parents. Dans ce
cadre, les patronymes sont aussi des toponymes (en tant que lieux d'émergence des clans ou de
séparation en différents lignages). Divers autres choses peuvent induire de la parenté dite
rituelle , comme cheminer ensemble ou manger ensemble la même marmite (sacrée).
B-Spirale du temps sur quatre générations
Les termes d'appellation de parenté, qui tournent sur quatre générations, nous donne l'image
d'un temps cyclique "en spirale" (voir schéma 2).
niveau généalogique : +3 +2 +1 0 -1 -2 -3
H
om
m
e
s
Ego dit ciè "aîné" à x x
Ego dit ao "grand-père" à x x
Ego dit caa "papa" à x x
Ego dit ciè "aîné" / aajii "cadet"
à
x x
F
em
m
e
s
Ego dit ciè "aîné" à x x
Ego dit gèè "grand-mère" à x x
Ego dit nyââ "maman" à x x
Ego dit ciè "aîné" / aajii "cadet"
à
x x
C- Homonymie
Le lien d'homonymie vient redoubler l'assimilation des générations donnée par les termes
d'adresse. En général, on reprend le nom de quelqu'un qui se trouve en position d'aîné, c'est-à-
dire d'arrière-grand-parent. Ce qui provoque une assimilation quasi complète du jeune à son
ancêtre dont il reprend le nom ; on lui parle souvent en utilisant le duel "vous deux" (sous-
entendu lui et son ancêtre éponyme).
De façon générale, le fait de reprendre le nom de quelqu'un crée un lien particulier entre les
deux personnes.
D- Mythe d’origine et intemporalité, continuum êtres surnaturels/esprits/ancêtres
et hommes
Le mythe paicî d'origine des hommes et de la terre de Nouvelle-Calédonie sert aussi de
justification à la création des moitiés matrimoniales. Dans le mythe, des esprits commencent à
peupler la terre qui vient d'émerger de l'eau après un déluge, puis ils donnent naissance à un
être mi-homme/mi-esprit avant que n'apparaissent les hommes. On se trouve là dans le
continuum esprits / êtres humains.
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Le monde des esprits et des ancêtres (la surnature) est dit "choses d'ailleurs" en opposition à
celui des êtres vivants qui est dit "sur terre". De même, les hommes vivants sont dits les "vrais
hommes" en opposition aux hommes décédés qui deviennent les ancêtres.
E- Rapports aux ancêtres
Chez les Kanaks, le rapport à la mort et aux ancêtres est complètement différent de chez
nous : les morts, devenus ancêtres, sont toujours présents aux côtés des vivants pour les
soutenir dans toutes leurs actions par l'intermédiaire de diverses pratiques rituelles dont les
rites propitiatoires
Cet intérêt accordé aux défunts se manifeste notamment dans l'importance accordée aux
cérémonies de deuil et de levée de deuil qui regroupe chez le défunt ses parents paternels qui
reçoivent les parents maternels afin de leur rendre les affaires du défunt et permettre que
celui-ci deviennent un ancêtre dans son groupe paternel.
4. Notions de parentalité
A- La notion de parents varie d'une société à une autre
En Occident, le principe d'exclusivité fait qu'on n'a qu'un père et une mère ; ailleurs, un enfant
peut avoir de multiples pères et mères classificatoires (comme c'est le cas pour les Paicî), d’où
la répartition possible des droits et devoirs parentaux à un groupe de parents, ce qui n’est pas
sans influence sur la circulation enfantine.
B- Les six composantes de la parentalité (d'après Esther Goody 1982 et Mireille Corbier
1999)
Dans de nombreuses sociétés, le fait de concevoir et de donner naissance à un enfant n'est pas
une condition nécessaire et suffisante pour en être les parents. Il faut en ajouter au moins cinq
autres :
(1.Conception et gestation)
2. Nourrissement
3. Éducation
4. Soutien et garantie
5. Identité juridique
6. Obligation réciproque d'aide et d'entretien
C- Liens sur l’adoption
On peut donc ainsi opposer une délégation partielle de certaines de ces composantes au
transfert institutionnalisé de l'ensemble (hormis la première) que constitue l'adoption plénière ;
l’adoption peut être exclusive (substitution totale des droits des parents par ceux des tuteurs)
ou inclusive (coexistence des droits des géniteurs et des éducateurs) ; elle peut être aussi
ouverte (conservation de liens avec les géniteurs de l’enfant).
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D- Nourrir et éduquer :
Dans de nombreuses sociétés, il existe un parallèle fort entre adoption-fosterage et mise en
nourriture, en éducation, en apprentissage soit entre nourrir et éduquer (latin alo = "nourrir,
élever" > alumnus = "nourrisson, enfant" ; la même chose chez les Paicî où un même mot èrù
désigne à la fois le fait de d’élever, de soigner et de réserver un enfant pour l'adopter).
5. L'adoption : pourquoi faire ?
En Europe occidentale, l'adoption a eu trois fonctions principales qui ne s'excluent pas
mutuellement :
Procurer une famille aux orphelins et enfants trouvés. Procurer une progéniture sociale aux
couples sans enfants. Procurer à un couple ou à un individu un héritier à sa propriété,
transmission des biens et des statuts.
Notons que, dans nos sociétés, le lien entre adoption et orphelins est très contemporain et date
d'après la Première Guerre mondiale. Aujourd’hui, on parle surtout de "l’intérêt de l’enfant".
Si pour les historiens de l'Europe médiévale, l'adoption, est conçue comme une manipulation de
la parenté, pour les ethnologues, elle fabriquent de la parenté.
Dans les sociétés dites traditionnelles, les études sur l'adoption insistent beaucoup sur la notion
de circulation des enfants (en parallèle souvent à celle des femmes par les mariages). L’adoption
y a les fonctions principales suivantes :
donner des parents à des enfants qui n’en ont pas et vice versa
les nécessités de la survie et de la reproduction du groupe
aider des individus à acquérir de meilleures positions
la balance des sexes
"tirer" l’enfant (le soustraire à une mauvaise influence, souvent de l’ordre de la
sorcellerie pour le protéger)
intérêt économique : enfants mis en gage, en apprentissage, en placement pour travail
domestique
donner un soutien à des parents âgés et isolés
créer des relations nouvelles entre groupes ou en entretenir des anciennes (en parallèle
avec l’alliance)
remplacement de l’infanticide, etc.
Notons enfin que les enfants et adultes déplacés peuvent l’être en tant que fils/fille mais aussi
en tant que gendre/bru, ou dans toute autre relation de parenté, notamment petit-fils/petite-
fille
On peut résumer ainsi les quatre causes principales des transferts juvéniles en société dite
traditionnelles (Suzanne Lallemand, 1993) :
1 2 3 4
survie
reproduction
nécessité convenance
sociale
commodité
(enfants orphelins)
(tuteurs stériles)
(excès de descendance)
(divorce)
(balance
des sexes)
(tirer l’enfant)
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Enfin, notons que dans le cas d’adoptions répétitives entre deux groupes ou plus, ces transferts
peuvent se faire selon :
un échange direct (un enfant contre un enfant) un échange différé (un enfant qui sera
rendu ultérieurement)
ou encore un échange asymétrique (c’est toujours le même groupe qui reçoit et le même
qui donne)
6. L’adoption kanak
Deux types principaux de transferts kanak qui sous-entendent le transferts des droits et
obligations parentales des parents biologiques à des parents adoptifs :
le prêt, gardiennage temporaire, que l'on appelle fosterage : l'enfant est élevé ailleurs,
jusque vers ses 12 ans
le don, adoption proprement dite, avec changement d'identité si changement de lignage
Entre ces deux pôles de la circulation enfantine kanak, il faut noter aussi :
l’attribution de tel enfant à un parent donné sans changement de domicile ni d’identité,
ou encore l’assimilation de deux personnes par le lien d’homonymie (généralement un arrière-
grand-père(/mère) et son arrière-petit-fils(/fille)
A- Cumul des filiations et des interdits
En Nouvelle-Calédonie, il n'y a pas de secret adoptif, c'est-à-dire que les enfants transférés
savent qui sont leurs parents biologiques et le plus souvent conservent des relations avec eux : il
y a donc cumul des filiations (adoption simple) et non pas remplacement de l'une par l'autre
(adoption plénière). Ce qui induit un cumul des parentés et des prohibitions de l'inceste
B- Parallèle entre la circulation enfantine et la circulation des femmes par les
alliances
Chez les Kanaks paicî, on fait les mêmes présents et cérémonies coutumières dans les deux cas
(on "prend" et on "pose" une femme comme un enfant) pour les installer dans leur nouveau
lignage (donc en cas d’adoption en dehors de son lignage de naissance).
Notons que je ne parle ci-dessous que des dons d'enfants, les seuls repérables de manière
fiable sur les généalogies.
Les fosterages, qui n'interviennent pas de façon définitive sur les généalogies, n'étaient
souvent pas mentionnés.
Disons simplement qu'ils se produisent le plus souvent pour conforter les liens d'alliance :
autrement dit, un enfant sera confié momentanément à son oncle maternel direct ou à quelqu'un
du lignage de son oncle.
Six raisons principales président aux transferts juvéniles qui influent sur le sexe de l’enfant
donné :
On donne une fille pour :
- le règlement d’une dette - la réconciliation de deux lignages
- l’arrêt d’une guerre
- le remplacement d’une femme qu’on n’a pas pu rendre dans le cycle des alliances
matrimoniales ou le rappel d’une alliance passée
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On donne un garçon pour :
- le remerciement d’un geste ou service rendu - éviter l’extinction d’un lignage (dans ce
cas-là l’oncle maternel prend son neveu, fils d’une sœur)
On donne un enfant de l’un ou l’autre sexe pour :
- combler l’absence d’enfant d’un couple
- rétablir l’équilibre des sexes dans une fratrie (un garçon qui n’a pas de sœur peut avoir
des difficultés à obtenir une femme ! car la règle veut que l’échange des femmes soit
équilibré)
C- Transferts d'adultes
Intégration d'adulte "étranger" dans un lignage et même d'un lignage nouveau-venu en son
entier dans un autre qui l'accueille selon le même processus d'adoption
D- Nature des transferts constatés
Un quart des enfants recensés dans les généalogies a fait l’objet d’un transfert (soit 341 sur
1374).
La moitié des enfants transférés provient d’une mère célibataire (nécessité d’avoir une filiation
officielle) ; mais tous les enfants non reconnus par leur père ne sont pas adoptés (20 % ne l’ont
pas été).
La moitié des enfants transférés reste dans leur lignage de naissance ou dans un lignage frère
42 % des enfants transférés le sont dans un lignage allié matrimonial
E- Qui sont les parents adoptifs
Pour les enfants nés d’une mère célibataire :
- 58 % des enfants non reconnu par leur père sont adoptés dans leur lignage de
naissance, essentiellement par un frère de la mère (29 %) et par le père de la
mère (27 %)
- 42 % des enfants "sans père" sont adoptés dans un autre lignage que celui de la
mère (patronyme différent) : 9 % par le grand-père maternel de la mère, 10 % par
des beaux-frères classificatoires de la mère, 5 % par le mari ultérieur de la
mère, 12 % par des alliés plus lointains
Pour les enfants nés d’un couple :
- 66 % sont donnés dans un autre lignage que celui du père biologique,
essentiellement dans celui de la mère, dont 7 % à des oncles utérins, 4 % à des
grands-pères maternels et 4 % à des mères classificatoires
- 34 % sont donnés à l’intérieur de leur lignage de naissance, dont les deux tiers
(26 %) à un père classificatoire (FrP)
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Conclusions
Ma participation aux travaux de ce sixième colloque du GREPFA-France m’a suggéré quelques
réflexions, comprenant mieux en quoi mon intervention pouvait cadrer dans les préoccupations
des participants. En effet, une des interrogations en pratique dans l’accueil familial
thérapeutique m’a semblé être la place respective de la famille naturelle et de la famille
d’accueil face à l’enfant ou à l’adulte placé. Vu de l’extérieur, on a le sentiment que l’on ne veut
placer les liens affectifs et « familiaux » que du seul côté des premiers alors que les seconds
doivent n’être considérés que comme des « professionnels » intervenant dans un processus
thérapeutiques et que cela ne doit pas laisser place aux sentiments. Aussi, pourquoi parler de
famille d’accueil, surtout quand il s’agit du placement d’enfant ? Cette réaction un peu naïve de
quelqu’un peu au fait de ces pratiques me confortent dans l’idée que la parentalité n’est pas
seulement une affaire de conception et de gestation, ce que les ethnologues, à la suite d’Esther
Goody affirment depuis de nombreuses années.
Références bibliographiques
CORBIER Mireille (éd.)
1999 Adoption et fosterage. Paris, éd. De Boccard, coll. De l'archéologie à l'histoire, 392 p.
CORBIER Mireille
1999 "Introduction : Adoptés et nourris", Adoption et fosterage. Paris, éd. De Boccard, coll. De
l'archéologie à l'histoire : 5-41.
GOODY Esther
1982 Parenthood and Social Reproduction : Fostering and Occupational Roles in West Africa.
Cambridge.
LALLEMAND Suzanne
1993 La circulation des enfants en société traditionnelle. Prêt, don, échange. Paris,
L'Harmattan, coll. Connaissance des hommes, 224 p.
LEBLIC Isabelle
2000 "Adoptions et transferts d'enfants dans la région de Ponérihouen", En pays kanak. Alban
Bensa et Isabelle Leblic (éds), Paris, éd. de la MSH, coll. Ethnologie de la France 14 : 49-
67.
LEBLIC Isabelle (éd.)
2003 De l'adoption. des pratiques de filiations différentes. Clermont-Ferrant, Presses
universitaires Blaise Pascal, coll. Anthropologie (sous presse).